29 août 2021

La Randonneuse (suite 2)

 


Nous étions en fin de journée, et nous décidions d'aller prendre une bonne douche avant que la cohue du camping ne débarque dans les sanitaires.

Tout de suite après, nous nous installions à notre petite table pliante et nous nous accordions une petite demi-heure de lecture, avant de préparer le repas. Bien installés, ou plutôt bien affalés, dans nos chaises de toile, elles aussi pliantes, nous parcourions nos livres respectifs. Absorbés par nos romans, nous n'avions pas vu l'arrivée très discrète de l'occupante de la petite toile derrière nous. Elle avait contourné notre emplacement, en longeant le plan d'eau. C'est la fermeture éclair de la petite tente qui nous tirait de notre lecture. Nous découvrions la présence de cette personne. Elle était accroupie devant la toile si bien qu'on ne voyait que sa chevelure dépasser.

Nous replongions dans notre lecture, après avoir échangé un regard interrogateur, accompagné d'un sourire amusé.

Très peu de temps après, nous entendions des pas et voyait la jolie silhouette de notre voisine, s'éloigner vers la sanitaire.

Nous rangions nos livres et commencions à préparer notre salade de ce soir, faite de tomates, d'hanchois, d'œufs durs, de thon et de salade verte.

Notre voisine, vêtue d'un long tee-shirt, réapparut, des vêtements à la main, les cheveux mouillés, après sûrement une bonne douche. Nos regards se croisaient enfin, et nous pouvions échanger un "Bonjour." Elle étendait son linge, après avoir enlevé celui qui était sec.

J'entamais la conversation :

- Vous dormez dans ce minuscule abri ?

- Oui, j'avoue que ce n'est pas confortable. Mais c'est ainsi quand on fait de la randonnée. On s'allège le plus possible.

-Mais vous devez sortir de là toute courbaturée.

-C'est exactement ça. Je ne peux m'allonger de tout mon long. Je dors en chien de fusil, et le matin pour reprendre la route, je sens mes reins, lors des premiers kilomètres. Après ça va.



-Et vous venez d'où, comme ça ?

- Je viens de Estaing, un petit village de l'Aveyron.

- Oups ! Mais combien de kilomètres avez-vous fait ?

- Je ne sais pas. Peut-être, un peu plus de 250.

- C'est fou !

- Mais je prends mon temps. J'en fais une vingtaine par jours.

- Quand même...

- Mais là, il faudra, que je m'arrête quelques jours. J'ai un mollet qui me fait mal. Une petite déchirure, sans doute.

- Le mollet, le dos.... Je suis admirative. Mais vous vous faites du mal. En plus avec tout ça sur le dos, ajouta Julia, ma compagne.



- Comme je vous l'ai dit, j'emporte le minimum. Cette ridicule tente (elle désigne du bras sa mini toile), très peu de vêtements (là, encore, elle montre ses habits qui sèchent sur le fil.), et même la nourriture, j'achète sur place et ne je ne prends que des fruits et de l'eau pour faire la route. D'ailleurs, le camion sicilien ne va pas tarder à arriver. Il faut que j'y ailles.

- D'accord, on ne vous retarde pas d'avantage.

Finalement, la femme toute discrète qu'elle était, échangeait facilement.

Dans ce camping, il n'y avait pas de restaurant. Seuls des camionnettes des alentours venaient proposer des repas à emporter pour les campeurs. Tous les jours, le thème changeait. Aujourd'hui, c'était des spécialités siciliennes, hier, il me semble avoir vu des crêpes, et demain des pizzas. Ça fonctionnait bien apparemment.

Peu de temps après, notre randonneuse revenait tête basse. La camionnette sicilienne n'était pas venue, une panne de moteur étant à l'origine. Notre voisine était sans nourriture ce soir là. Julia et moi, l'invitions à notre table. Nous avons dû insisté. Gênée dans un premier temps, finalement, elle acceptait.


à suivre.....


6 commentaires:

  1. Je t'ai trouvé une jolie randonneuse pour illustrer la bonne marche de ton histoire :
    http://dominiquedusud.d.o.pic.centerblog.net/5b2eada2.jpg
    Bon dimanche, Gil.

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    1. Z'en effet Phil.
      Le moindre qu'on puisse dire, c'est que celle là, elle voyage très léger.
      Merci pour ce très beau lien, j'apprécie vraiment.
      Et ça fait du bien aux yeux.

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  2. C'est gentil de la part du narrateur et de sa compagne, mais peut-être pas désintéressé!
    Merci, Phil, pour ta randonneuse. Ce n'est apparemment pas la comtesse aux pieds nus. Même si on veut tout retirer, ce chemin-là exige de mettre de solides chaussures!

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    1. Un couple qui veut qu'à faire du bien, Marianne.

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  3. Charmant épisode qui illustre bien la magie des rencontres dans les Espaces partagés de Nature exempts de vie commerciale et consumériste même si le prix de la nuit dans ce cas est tarifé. Il est toujours aisé de s'en affranchir.
    Cet épisode est très apaisant de légèreté, merci

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    1. Pas du tout tarifiée cette rencontre, Henri. Voyons.
      Ravi que tu aies passé un bon moment à me lire.
      Il y a encore un peu d'humanité dans ce monde.

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Ça plane pour moi.

C'est ton sourire qui m'a accueilli, en premier. Tu es assise en face de moi, jambes croisées, jupe bien relevée. Nous dégustons ens...